L'année dernière déjà j'avais écrit, au sortir de mon marathon d'avril 2012 à Nantes, que c'était la dernière fois que je courais un marathon, que la distance m'ennuyait. L'an dernier j'avais terminé parce qu'au moment où j'en ai eu marre j'étais en pleine cambrousse et il me fallait de toute façon revenir en ville, alors autant le faire en courant qu'à pied.
De fait l'automne dernier, contrairement à l'année d'avant, je n'avais pas couru de marathon d'automne.
Mais j'ai reçu les mails de l'organisation du marathon de Nantes, j'ai vu qu'ils avaient complètement modifié le parcours, qu'il était beaucoup plus en ville que dans la campagne dans des endroits paumés. je me suis laissé tenté, je me suis inscrit.
Ce dimanche 21 avril je me suis donc élancé du parvis de la cathédrale pour courir ces 42 kilomètres et quelques. Ayant eu une préparation très erratique cet hiver, je ne m'étais pas vraiment fixé d'objectif, je me suis dit que j'allais courir à allure tranquille, grosso modo 12km/h, qui est mon allure de confort, celle sur laquelle je me remplie dans mes courses quand j'ai un moment de faiblesse. En plus c'est une allure très pratique pour les calculs, ça fait exactement cinq minutes au kilomètres.
La température était excellente, fraiche mais pas trop, il n'y avait pas trop de vent, le soleil était pâle, des conditions excellentes pour une belle course.
Je suis parti un peu lentement, parce que le départ était groupé et qu'il fallait réussir à prendre son rythme dans la marée des jambes sans faire une chute idiote. Après les cinq premiers kilomètres, le ruban des coureurs a commencé à s'étaler, et j'ai pris mon allure de croisière.
J'ai fait la première grande boucle, le détour par la campagne de l'autre côté de la Loire, le passage sur l'île entre les bras de la Loire, je suis revenu dans la ville, j'ai fait le tour en ville, je suis redescendu en direction de la Loire, et je me suis arrêté.
J'ai arrêté mon chrono, défait mon dossard, fait demi-tour. C'était une décision immédiate, à laquelle je ne pensais pas cinq minutes avant, et que je ne suis pas certain de vraiment m'expliquer.
J'étais en pleine forme, je n'avais aucune blessure, aucun signe d'une faiblesse à venir, mais je n'avais plus envie de courir. Dix mètres avant de tourner pour retourner faire un tour de l'autre côté de la Loire, je me suis dit stop.
J'avais déjà fait 29 kilomètres, j'avais couru 2h35, il ne me restait plus qu'une grosse heure à courir, mais je n'en avais plus envie.
Sur le trottoir des enfants qui m'avaient encouragé avaient l'air très déçu, "faut pas abandonner Patrick!", ils avaient l'air aussi affectés que s'ils me connaissaient, ils prenaient la chose très à coeur. Je me suis même demandé s'ils n'étaient pas à deux doigts de pleurer. Ca m'a ému.
Et ça m'a questionné. Je me suis demandé pourquoi j'arrêtais, ce qui pouvait le justifier. Finalement j'ai remis mon dossard, et je me suis remis à courir. Je suis reparti au passage du meneur d'allure des 3h45.
Sauf que je me demandais pourquoi je courais, je n'étais plus dans ma course. Est-ce que je courais juste parce que ça ne se fait pas d'abandonner, pour prouver aux autres que je ne suis pas un loser? Je ne savais pas.
C'est la première fois de toute ma vie (et ça fait quand même quelques années que je cours) que je ne termine pas une course, et je n'ai même pas l'excuse d'avoir une blessure, une crampe ou une tendinite. Mais je devais bien l'admettre, je ne courais plus pour moi, mais plutôt pour les autres, pour ne pas dire que j'avais abandonné.
Ce n'était pas une motivation suffisante. Au 35ème kilomètre j'ai eu l'occasion de prendre un raccourci pour rentrer plus vite à l'hôtel, je l'ai pris. Il ne restait plus grand chose à courir, mais j'en avais ma claque.
Je suis rentré à l'hôtel, je n'ai pas franchi la ligne d'arrivée.
Cette fois-ci je pense que c'est un peu plus définitif, c'était vraiment la dernière fois que je courais un marathon. J'aime toujours autant courir, mais ce ne sera plus sur cette distance.