"Les gens se tueraient pour être beaux. Tentés par un monde de poupées plastiques, ils écartèlent leur peau molle, attentent à leur poitrine plate et peroxydent leurs cheveux sombres. Les gens se trompent. Il faut être con, un peu, pour désirer la beauté. Elle fait trop mal - avec ma gueule de statue grecque, je sais de quoi je parle. Les médecins, les boulangères, les pharmaciennes ou les guichetiers de gare, pas un ne vous épargne : entre les impôts et les premières gelées, ils font de vous l'objet de leurs conversations les plus criardes. Comme l'exception confirmant une règle de laideur, je suis le seul beau de la famille. A nous voir réunis sur un cliché de vacances, quel imbécile croirait à nos liens de sang? Chaque semaine, dans la disgrâce de ses robots ménagers, une mère s'essuie les yeux du bout de ses doigts enfarinés. Les rhinocéros ne font pas de libellules. Les parents ingrats ne font pas de jolis enfants. Trop difficile d'être à l'origine de ce fils improbable, en silence, cette femme bafouée prépare des bavaroises salées. De ma naissance à ce jour, les voisins m'ont trouvé plus de pères que d'hommes sur terre. De Gennevilliers à Toronto, plus qu'il n'existe de lieux d'abandon. Dans le piaillement des petites gens, les rumeurs frappent plus fort que des poings.
C'est ma beauté qui me tue."
Ainsi commence Camping Atlantic, d'Ariel Kenig. Un auteur que je ne connaissais pas il y a peu, c'est un contact sur facebook qui m'a conseillé ce livre.
Camping Atlantic, c'est la révolte classique d'un adolescent, mais d'un adolescent un peu particulier. Adonis est beau. D'une beauté à laquelle tout le monde est sensible. D'une beauté tellement visible qu'elle en devient gênante. D'une beauté qui amplifie aussi la laideur des autres, l'ingratitude de la vie.
Ce sont les vacances en famille au camping, Adonis, son frère Nicolas, Sarah la copine de Nicolas, et leurs parents. Des vacances banales, des vacances de pauvres, des vacances immuables, des vacances que le bel Adonis ne supporte pas. Avec son frère Nicolas, il veut refaire le monde.
Ce livre est-il un livre subversif? Il est en tout cas intéressant de lire un point de vue différent, même si la subversion a tout de même des limites somme toute conventionnelles dans ce livre, ce qui est presque dommage. La fin m'a déçu, transformant l'oeuvre en un simple fait divers estival. Néanmoins c'est une lecture que je vous conseille, parce qu'elle vous enseignera peut-être cette chose toute simple: la beauté n'est pas forcément un cadeau, elle peut aussi être un handicap.
Ça me rappelle que sur Facebook j'ai récemment fait un commentaire sur ta beauté!
(gniark gniark!!!)
Rédigé par : Fab | 11/08/2008 à 00:40